Le véritable message des alchimistes

10/03/2015 10:11

Si parfois les vrais arcanes de l'Alchimie se trouvent dissimulés à la connaissance des profanes, dans de vieux grimoires sans âge, les initiés à la divine chimie les ont également transcrits  dans la pierre. Les monuments qu'ils ont signés portent des décorations en rapport avec ce savoir du passé.

Alors que la foule s'extasie devant la beauté de certains édifices, des pèlerins beaucoup plus discrets viennent interroger les "clés" de l'architecture et demander à la pierre de livrer certains mystères que les initiés ont  jadis masqués dans les replis des édifices. Là où le profane ne voit qu'images religieuses en rapport avec des illustrations de l'Ancien ou du Nouveau Testament et même parfois des scènes purement profanes, l'homme averti déchiffre dans la représentation des message de haute science. Ils ont été laissés là, par des sculpteurs qui servirent d'interprètes aux maîtres de l'hermétisme.

A Munich, où nous venons de découvrir tout autour de la Colonne de Marie, d'évidents symboles, le Neues Rathaus, le Nouvel Hôtel de Ville est un véritable livre muet totalement voué à l'Hermétisme.

Les imagiers ont frappé du sceau des Adeptes de nombreuses parties de l'édifice. Maître d'œuvre et compagnons ont répondu à des directives secrètes, dictées par une élite, pour élaborer le symbolisme architectural des sites choisis. Hélas, mutilations, massacres et saccages ont provoqué des déprédations. C'est le cas particulièrement sur la façade du nouvel Hôtel de Ville de la capitale bavaroise. Le Neues Rathaus a été bâti par Hauberisser, dans le style gothique, de 1867 à 1875, période du règne du roi Louis II. Ce monument fut agrandi de 1900 à 19006.

Lorsque l'on quitte la Marienplatz pour la Wienstrass, on découvre un énorme dragon qui semble jaillir du sol et monter à l'assaut de la façade, menaçant  un groupe humain saisi par la peur. Les curieux qui observent avec ravissement  les figures mobiles de l'horloge  du carillon, dansant ou s'affrontant dans un tournoi sans fin, ne voient pas ce monstre effrayant.

Lorsque l'on accède à la cour intérieure du monument, deux petites voutes gothiques surmontées d'animaux mythologiques s'offrent aux regards des visiteurs. A la base de l'une d'elles, un alchimiste coiffé d'un bonnet phrygien  figure l'homme retourné. Les bras croisés, il ferme la bouche, en faisant pression sur celle-ci avec la main droite. De l'autre côté, une sorte de gargouille mi-homme, mi-monstre, dotée de longs cheveux, procède de même dans une attitude rituellique, qui évoque sans s'y tromper le signe du Maître Secret.

Se taire ou garder sa langue, nous engage à vivre le silence. Ici, il est nécessaire de s'arrêter un instant, pour découvrir ce livre confidentiel qui nous prouve que l'instruction peut aussi se faire sans la parole : simplement par le regard.

Cette maison commune est une authentique demeure philosophale. De toute part, un monde pétrifié fait  revivre un savoir ancestral. Ce dernier suscite par l'image des enchaînements de pensées et entraîne l'initié ou le profane dans le monde de la métaphore ou de l'allégorie.

L'architecte Hauberisser était le digne représentant d'une société initiatique à la fois Opérative et Spéculative. A travers trois sculptures qui figurent, sur l'aile de la construction située à l'Orient,  ces personnages constituent les archétypes de la science des symboles.

Au centre, le Maître présente la Pierre polie, A sa droite, l'Alchimiste coiffé du bonnet phrygien tient à bout de bras un Livre fermé. A sa gauche, un Veilleur offre la Coupe du Graal.

Alors que le scientisme et le matérialisme le plus exacerbé, et un capitalisme débridé conduisent l'Homme à sa perte, certains Hauts Lieux nous affirment que notre monde peut encore être ré-enchanté.

Denis Diderot a écrit:

  Tout s'anéantit, tout périt, tout passe; il n'y a que le monde qui reste. Il n'y a que le temps qui dure.

 

 

           
Guy Tarade et Christophe Villa-Mélé
Photos de la collection privée de Guy Tarade et Christophe Villa-Mélé