Avignon et le secret du Phénix

20/04/2015 08:54

Giono l’enchanteur a mis sous son charme tous les visiteurs qui arpentent les collines couvertes d’oliviers de Manosque. Cette petite ville florissante, jadis place forte d’une certaine importance a su garder toute sa  séduction. La Vierge Noire des Gitans, Notre-Dame du Roumigier veille toujours sur cette cité qui lui est chère. De ses murailles du XIVe siècle, la cité n’a gardé que deux portes, la porte Saunerie et la porte Soubeyran. Toutes les deux nous conduisent directement sur la route qui glisse vers le Rhône, en direction d’Avignon.

Les remparts d’Avignon conservent au coeur de leurs vieilles pierres des signes de compagnonnage sont les symboles figuraient déjà sur les murs des temples de la Vallée du Nil.

Vers 1815,1820, un petit garçon venait souvent méditer devant ces signes étranges qui donnaient à la matière minérale, comme une identité, une noblesse immortelle. Il se nommait Agricol Perdiguier, les Enfants de Salomon le nommèrent  Avignonnais la Vertu.  Sa statue ( bien modeste ) se dresse aujourd’hui dans la cité des papes, témoignant le relief qu’il apporta à sa vie et de la grandeur de ses sentiments humanistes vis à vis de ses semblables.

Agricol Perdigier nous a laissé un slogan:

“ Que tous les Nobles-Coeurs s’unissent,

le Règne d’Amour est prochain !  “

Lorsque vous passerez en en Avignon, n’oubliez pas d’aller saluer le bronze d’Avignonnais la Vertu, ce père du Compagnonnage moderne, qui prêchait la conjonction de l’esprit et des mains, cette pure synthèse de la pensée et de l’action !

Derrière sa ligne de protection, la Cité des papes a su conserver malgré le modernisme, sa merveilleuse beauté primitive.

“ Acque, condunt urbes “

“ Ce sont les eaux qui créent les villes, disait Pline.          
Dans l’antiquité, les fleuves et les rivières déterminaient le choix des sites urbains.

À l’époque où la civilisation grecque s’épanouissait à Marseille et sur de nombreux comptoirs commerciaux du littorale méditerranéen , le Rhône portait le nom de Rôdanos ( la rose ! ).

Dans les temps anciens, la rose fut honorée par les dieux et les héros. Elle ornait le bouclier d’Achille, le casque d'Hector, d’Enée et l’écu des chevaliers du Moyen Age.

Le Rhône, le fleuve de la Rose, était connu des prêtres égyptiens qui le signalaient comme une voie allant vers l’océan d’Hyperborée. De la Méditerranée  à Lyon, de nombreuses découvertes archéologiques ont prouvé cette réalité.

Dans le centre de la ville, des fouilles effectuée pour la fondation du parking souterrain qui s’étire devant l’Hôtel des Monnaies, révélèrent l’existence dune ville néolithique qui, aux premières estimations aurait abritée 40 000 âmes !

Le site d’Avignon a été occupé depuis la plus haute antiquité . Des prospections archéologiques ont démontré récemment que, deux mille ans avant notre ère, des populations chalcolitiques s’étaient fixées sur l’oppidium du Rocher des Doms et sur les bords du Rhône, à l’emplacement de l’ancien quartier de la Balance.
Lorsque pour des raisons de salubrité et de modernisme, on rasa  cette partie de la ville, grande fut la surprise des archéologues quand on les informa, que les travaux de terrassements avaient permis de retrouver, profondément enfouies dans le sol, des statuettes d’Isis et d’Osiris !

 

LE BIJOU ET SON ÉCRIN

Le joyau d’Avignon était autrefois son palais des papes. Nous avons une idée de ce qu’était ce superbe édifice, en admirant dans l’église de Saint-Maximin ( Var ), le panneau d’un retable représentant Jésus devant Pilate. Cette oeuvre datant du XVIe siècle offre la plus ancienne vue de la célèbre construction.

L’Hôtel des monnaies, construit en 1619, dont la façade est une véritable fresque alchimique, nous prouve que c’est en Avignon que le PHÉNIX doit toujours renaître de ses cendres pour annoncer la victoire de la Lumière.       

Le nom même d’Avignon vient, nous le savons, d’AVENICA : AD VENICIO, c’est à dire VENISE ou VENICE : soit Phenice ou Phenix !

L’édifice est signé par le pape Paul V Borghèse. Ce “ pontife “ prouvait dans l’architecture son attachement à l’ancienne chymie sacrée, que pratiquèrent les grands noms de l’Église.       

Le Phénix apparaît dans les sculptures et il est curieux de constater que LE BAUME DE VENISE, ce vin blanc qui coule dans la bouche comme le nectar des dieux, prouve lui aussi les sources de la toponymie locale.

 

LES PAPES

C’est le séjour des Papes au XIVe siècle qui a fait d’Avignon une ville unique par l’importance de ses monuments et l’éclat de son renom.

Leur présence dans les murs de la ville commence ainsi:

Clément V, archevêque de Bordeaux, avait été élu à Pérouse en 1305 et couronné à Lyon en présence du Roi Philippe le Bel. Redoutant  l’insécurité de l’Italie et les dures conditions dans lesquelles il aurait à régner à Rome, en bon politicien, il choisit Avignon comme résidence au printemps 1309.

Manoeuvré par Philippe le Bel, Clément V mit fin à l’Ordre du Temple, après un procès inique.

Du haut de son bûcher, Jacques de Molay lança l’anathème divin contre le compères. Un an plus tard, ils avaient quitté pour toujours notre plan matériel...

Sept papes se sont installés en Avignon sous le règne des Rois Angevins, de 1305 à 1376 :

Clément V ( 1305-1314 )

Jean XXII   ( 1316-1334 )

Benoît XII   ( 1335-1342 )

Clément VI ( 1342-1352 )

Innocent VI ( 1352-1362 )

Grégoire XI ( 1370-1378 )

Urbain V      (1362-1370 )

Les portraits de ces prélats sont accrochés dans une salle du palais des papes. Le visiteur aux yeux d’inquisiteur fera une étonnante découverte en les contemplant. En effet, réalisés après coup, c’est le même modèle qui posa pour l’artiste, qui les réalisa.

Malgré certaines postiches et des habits variés, le subterfuge est apparent.

Le pontifes qui a le plus marqué son époque fut Jean XXII. Partisan des Templiers et leur fidèle défenseur dans les conciles, Jacques d’Eusse avait peut-être recueilli auprès d’eux les connaissances secrètes, qu’il est historiquement difficile de lui contester. À moins qu’il ne les eût acquises au contact d’Arnaud de Villeneuve et de Raymond Lulle, pendant ses séjours à Montpellier et à Paris, alors que la science hermétique florissait dans ces universités à l’égal de la médecine et du droit canon.

Le moine cordelier François Pagi nous parle du fameux et fantastique trésor de Jean XXII. Ce pape laissa derrière lui, dans les caves de son palais d’Avignon, exactement 18  000 000 de florins d’or en monnaie frappée et valeur 7 000 000 de pierres précieuse, des vases d’église, ainsi que des objets sacrés et du mobilier.

Eugène Canseliet assurait que Jean XXII possédait deux cents quintaux d’or ! Ce qui faisait 20 000 livres anciennes... Le disciple de Fulcanelli avait été frappé par la devise que saint Malachie avait choisie pour ce pape: DE SUTORE OSSO : DU SAVETIER D’OSSA ! Pour lui la substitution d’un voyelle  était si latente qu’on pouvait traduire immédiatement par :

DE SATORE OSSEO
DU SEMEUR D’OSSA

 Selon le disciple de Fulcanelli, la portée philosophique de ce vocable  est grande. Sator figure dans le carré magique et désigne L’ARTISAN--LE PÈRE--LE CRÉATEUR.

Le pape Jean XXII mourut en Avignon le 4 décembre 1334. Il avait 90 ans. On l’inhuma dans un superbe tombeau, dans une chapelle jouxtant la sacristie.

Hélas, le vandalisme révolutionnaire, qui se déchaîna furieusement sur la cathédrale avignonnaise, n’a laissé, de la sépulture, que le vestige délabré permettant toutefois d’en imaginer toute l’ancienne splendeur.

En 1793, le monument ne se trouvait déjà plus à sa place primitive, puisque le Seigneur Archevêque avait ordonné en 1749, son déplacement avec ouverture préalable du sarcophage.

Un procès-verbal dressé à l’époque abonde de précisions sur cette cérémonie. On peut toujours le consulter, chez le lointain successeur de maître Poncet qui enregistra l’acte, le 8 mars 1759.

On sait que le corps était enveloppé dans une forte toile entouré de cordes de long et par le travers.

Le chanoine Molière retira du doigt de l’illustre défunt, une lourde bague en or pur retenant une grosse émeraude “ dont le brillant était entièrement obscurci par le baume et les autres ingrédients qui avaient servi à embaumer le corps.”
Le dernier alchimiste, vivant actuellement dans la cité des Papes, prétend que cette pierre n’était pas naturelle ! L’émeraude, silicate double d’alumine et de glucinium n’aurait pas souffert des aromates divers utilisés pour l’embaumement.

 

Il ne fait aucun doute pour lui, que c’est  “ l’émeraude des philosophes  “ que le pape alchimiste avait voulu conserver dans la paix du tombeau.

Tout au cours de l’histoire Avignon a joué un grand rôle occulte dans la vie de la Provence. La ville fut un symbole de tolérance, dans les périodes les plus troublées. Les Juifs et les Gitans souvent frappés par l’ignorance et l’ostracisme des hommes, trouvèrent refuge entre ses murs. Ils jouissaient là d’un asile sûr et d’une certaine compréhension.

On peut  penser que ce sont les influences cosmo-telluriques, dont les papes, qui s’installèrent sur ce site, avaient la connaissance, héritage des prêtres de l’ancienne Egypte. En un mot, la cité était  “ chargée “  !

Avignon est une ville que l’on ne découvre pas dans un guide, mais que l’on apprend dans la pierre.

Partout dans cette capitale du soleil, des monuments portent l’emprunte d’un savoir caché, d’un héritage légué par un collège d’initiés.

Si l’on en croit certaine prophéties, la ville devrait retrouver sa gloire perdue, en recevant dans les prochaines années, un Pontife qui abandonnera  Rome sous la poussée des masses populaires. Nostradamus y est pour quelque chose...Ne tirons pas de chèque en blanc sur le futur, mais souvenons-nous que le Rhône était le fleuve de la Rose, et qu’en Avignon, une cérémonie très secrète se déroulait le dimanche du Lactare, au Palais des Papes : LA REMISE DE LA ROSE D’OR.

Au Musée du Louvre, on peut encore voir celle offerte par Clément V au Prince-Évêque de Bale. Elle mesure 0,60m et pèse 305 grammes. Le bijou est en or fin. Or en réalité, cette rose est une églantine à cinq pétales, une image du pentalpha !

 

VILLENEUVE-LES-AVIGNON

Franchissons le Rhône, Villeneuve nous attend et nous accueille. Le Fort Saint-André, une ancienne chartreuse nous ouvre largement ses portes, c’est aujourd’hui un centre culturel. Pressons le pas vers l’hospice, Enguerrand Quarton nous invite à contempler LE COURONNEMENT DE LA VIERGE, son oeuvre maîtresse, un témoignage exceptionnel d’une époque où le mot art avait encore un sens très précis.

La fixation des papes en Avignon provoqua une fermentation intellectuelle et artistique qui marqua toute l’époque d’une pierre blanche. Leur départ provoqua un effondrement des valeurs, qui prit l’allure d’une véritable catastrophe.        

Lorsque Grégoire XI décida de regagner  Rome, en 1377, le coup fut terrible pour la cité.
                                    Le début du XVe siècle vit l’Europe se déchirer, ne laissant que peu de place aux peintres, comme à tous les créateurs. Enguerrand Quarton dut subir son époque et s’initier dans les ateliers d’artistes au goût de son temps. Calquant son art sur le style des enlumineurs français et les grands peintres flamands.

À Aix-en-Provence, il rencontre Barthélemy d’Eyck, un maître enlumineur au service du Roi René, souverain qui se plaît à évoluer au milieu d’une cour d’artistes et de savants. Enguerrand arriva en Provence avec de nombreuses références qui lui ouvrirent de nombreuses portes.

En 1446, alors qu’il réside à Arles, il se voit confier la réalisation d’un retable de l’église de Tarascon.

Un an plus tard, on le retrouve en Avignon, où il signe un contrat pour sept oeuvres. Le 24 avril 1453, l’artiste se voit confier la réalisation de LA VIERGE DU COURONNEMENT, une toile qui par la suite devait porter bien d’autres noms : “ Jugement Dernier “---” Sainte Trinité “---” Triomphe de la Vierge “---” Église Catholique “---et encore “ Divine Comédie “.

Le tableau dont l’inspiration fut sans doute  puisée dans l’imagerie populaire des cathédrale, est divisé en trois plans superposés. Le Paradis, la Terre, l’Enfer et le Purgatoire se partagent suivant des proportions étudiées.

La Vierge personnage central de l’oeuvre resplendit de toute sa beauté. Son visage est d’une pureté toute féminine, il éclaire, il rayonne.

La composition s’appuie sur une symétrie voulue dans laquelle le symbolisme se dissimule sous la forme.

Le commanditaire de cette pure merveille se nommait Jean de Montagnac, un chanoine de l’église Saint-Agricol, très lié aux chartreux, dont il vénérait la spiritualité. IL semble que ce soit ce derniers qui aient donné à Quarton des directives précises pour réaliser ce retable.

Illustrant la citation de la Genèse :

“ Dieu créa l’homme à son image “ , l’artiste a représenté le Père et le Fils, assis sur un trône, avec le même visage. Tous deux posent une main sur la couronne de la Vierge, que coiffe une colombe. L’extrémité de chaque aile touche les lèvres du Père et du Fils. Ainsi le Couronnement de la Vierge est-il l’oeuvre commune et indifférenciée de la Sainte-Trinité portée par le Verbe.

De chaque côté de la scène centrale, la vision du paradis se déploie, avec les élus classés dans un ordre liturgique.

Rome avec l’église Sainte-Croix de Jérusalem figurent sans souci de ressemblance, comme soudées l’une à l’autre. Au centre du retable, le Mont des Oliviers se reconnaît au calvaire qui sert de trait d’union entre le Paradis et la Terre.

Comme aux tympans de nos chefs-d’oeuvre gothiques, l’Enfer et le Purgatoire nous offrent leurs scènes hallucinantes.

Mais il y a bien plus encore sur ce tableau remarquable redécouvert en 1834 par Prosper Mérimée, alors inspecteur général des monuments historiques, à l’hôpital-hospice de Villeneuve. Nous laisserons au curieux et aux amateurs de  “ mystérieux-inconnu “, le soin de l’analyser.

 

Guy Tarade et Christophe Villa-Mélé©
Illustration graphique par Christophe Villa-Mélé